Les premiers renseignements que j’ai pu glaner proviennent d’un article du journal Le Progrès, paru en 1949, et célébrant le centenaire de la tournerie Montange
C’est en 1848 que Louis François Montange a créé un atelier artisanal de tournerie à Montréal. En 1853, son travail est remarqué lors de l’exposition des produits industriels et agricoles de Nantua : Montange de Montréal a présenté 2 rouleaux de métiers à tisser et une salière double en buis.
En 1882, Félix Montange, âgé de 23 ans, succède à son père, qui a 51 ans, à la tête de l’atelier qui a été installé dans des locaux plus adaptés à Condamine La Doye. Une quinzaine d’ouvriers y travaillent. L’énergie nécessaire pour les machines est fournie par une roue à aubes sur la Doye. Le document notarié qui acte, en 1882, la dissolution de la société de fait « Montange, père et fils » fait un inventaire détaillé des machines, bois bruts et objets prêts à être vendus. La société a bien grandi : la présence de 14 tours implique qu’il y a au moins autant d’ouvriers ! Et l’inventaire des matières travaillées indique que des produits tropicaux arrivaient jusque dans le Bugey : bois d’acajou, pointes de cornes de buffles qui complètent les stocks de buis, fayard, tilleul et noyer. Les objets fabriqués en stock sont utilitaires : 12.000 manches de tondeuses (?), des rouleaux de métiers à tisser, des roquets (bobines sur lesquelles s’enroulaient les fils de soie après dévidage des cocons) : ces deux derniers objets montrent l’importance du tissage de la soie dans la région à cette époque.
En 1884, Félix Montange achète la propriété du Moulin au comte de Douglas et réinstalle son entreprise à Montréal. Un barrage sur l’Ange avait été installé en 1858 pour le comte de Douglas. Deux roues à aubes fournissaient l’énergie à une scierie et à la tournerie. En 1904, l’établissement occupe 30 ouvriers.
A Montréal, l’industrie du bois était importante : des sept scieries (Magnard, Rosset, Guy, Tissot, Deguerry, Perret et Gorju) du début du siècle, quatre travaillaient encore dans les années 60 les sapins et épicéas issus des forêts environnantes pour en faire des poutres, planches ou madriers. A la fin du XXème siècle, il n’en reste plus une seule. Il n’y a plus de tournerie non plus, car celle des Montange a fermé ses portes dans les années 60.
De nombreux objets en bois (fayard, buis ou différents bois exotiques) ou en corne (de bœuf, de zébu ou de cerf entre autres) ont été fabriqués chez les Montange : depuis les poignées de vélo pour Peugeot au début du siècle, les manches de parapluie, les volants de voiture, pour finir par la mise au point d’un tire bouchon « à double vis ». Au début du 20èms siècle, la gamme des objets fabriqués « par un personnel intelligent et parfaitement instruit disposant d’un matériel moderne »
La tournerie avait été installée en complément d’une scierie, près d’une chute d’eau (de 2 mètres environ) suffisante pour fournir de l’énergie à l’aide de 2 turbines qui ont remplacé les roues à aubes en 1915. Un barrage (au lieu-dit « les vannes ») placé en amont dans le lit de la rivière l’Ange (ou le Lange selon certaines personnes) permet à une partie de l’eau de cette rivière de couler dans un canal d’amenée d’environ 1 km jusqu’aux turbines.
Cette tournerie employait de nombreux ouvriers et ouvrières jusque dans les années 60 où la concurrence s’est faite plus vive (objets en bois bon marché ou objets en plastique) et où le positionnement sur des objets de luxe n’a pas été possible par manque d’anticipation. Il n’y avait pas de service de « marketing » à l’époque ! La tournerie a donc fermé ses portes pour céder la place à l’industrie du moulage de pièces en plastique. En effet, dans les années 60-70, le plastique est devenu une des principales activités de Montréal La Cluse, que ce soit la mécanique pour la fabrication des moules destinés à reproduire des pièces plus ou moins précises ou sophistiquées ou le moulage pour fabriquer ces pièces en plus ou moins grandes séries. Oyonnax est capitale de la Plastic Valley.